Déclaration intersyndicale au conseil d’administration de BNP Personal Finance

 

Le 7 février, le Groupe BNP Paribas se félicitait de réaliser des profits records et où, de ses propres dires, la remontée des taux lui permet d’envisager de dépasser ses objectifs financiers de 2025, au même moment, BNPP PF annonçait près de 1000 suppressions de poste et un plan de départ volontaires. Les élus de BNPP PF ne peuvent que constater que la réussite du groupe ne bénéficie pas à tous. BNPP PF connaît actuellement son 5ème plan de réduction de l’emploi en 15 ans. Les élus ne peuvent que regretter le « deux poids, deux mesures » qui se met en place au sein du Groupe car il faut se souvenir que c’est bien cette même remontée des taux qui est présentée comme une des principales sources des difficultés économiques qui frappent aujourd’hui BNPP PF.

Ce PDV intervient dans une entreprise en mouvement, animée par de nombreux projets, et vivant encore les conséquences du précédent projet Impulse. Des projets de déménagements sont aussi en cours tout comme des projets touchant à l’organisation et aux conditions de travail avec la nouvelle Organisation du Temps de Travail et la migration de nouveaux outils en début d’année, dont la mise en œuvre ne s’est pas effectuée sans contraintes.

Depuis 2018, les salariés ont vu de nombreux plans être présentés, puis corrigés avant d’être encore remplacés, sans efficacité économique comme le démontre la situation actuelle. Les salariés de BNPP PF peinent de plus en plus à se reconnaître dans la stratégie des dirigeants de l’entreprise, qui prend un tournant radical. Ainsi, le plan en cours prévoit l’abandon des ambitions de développement issues du plan Impulse, pour se concentrer désormais essentiellement sur la recherche d’économies en vue de respecter les exigences de rentabilité de l’actionnaire.

Même si l’entreprise et les salariés sont habitués aux changements, leur succession sur une période courte a eu un impact fort sur les salariés et l’encadrement des équipes, en particulier au niveau du management de proximité et le support RH local. L’annonce de ce nouveau plan a constitué un vrai choc pour les salariés qui ne comprennent pas la cohérence du nombre de postes supprimés au regard de la motivation du projet et, plus encore, de la charge de travail constatée dans leurs activités. Le motif d’économie de masse salariale apparaît alors comme central, loin d’un projet d’entreprise structurant et motivant pour les salariés.

Les exigences de rentabilité hors-sol de l’actionnaire sur le métier crédit consommation, conduisent notamment l’entreprise à étendre toujours plus loin sa politique de renoncements, politique qui résultera une nouvelle fois en une perte de terrain face à la concurrence, soit un résultat entrant en pleine contradiction avec le motif économique du plan : la sauvegarde de la compétitivité. En adoptant une politique de recentrage des activités sur l’Europe occidentale et la Chine, les ambitions de développement à l’international se trouvent abandonnées, élément qui a pourtant fait pendant des décennies l’ADN de l’entreprise. Le choix de la Chine comme cible prioritaire de développement suscite par ailleurs des interrogations, pour ne pas dire des craintes : est-il seulement compatible avec la raison d’être d’une entreprise qui prétend « favoriser l’accès à une consommation plus responsable et plus durable » ?

S’il n’est pas question de nier le fait que des vents contraires se sont accumulés ces derniers mois, à commencer par le déclenchement de la guerre en Ukraine et la poussée inflationniste, il semble important de rappeler qu’il s’agit là essentiellement d’éléments exogènes et que l’implication des salariés n’est nullement mise en cause.

Et il s’agit là d’un point essentiel. Tous les salariés seront impactés par ce plan.

Tous font actuellement face à une situation très dégradée. Le climat social est déplorable. A la suite des réunions d’information sur le projet, de nombreuses situations difficiles ont été relevées, tant par les élus que par l’expert mandaté par le CSE, mettant en avant des propos injustifiés, des interprétations ou encore des propos déplacés générant des situations difficiles, de l’incompréhension voire des impacts sur la santé de certains salariés. Le manque de visibilité sur les organisations cibles et sur la nouvelle répartition des tâches ne permettent pas aux salariés de se projeter et de mesurer concrètement les impacts potentiels du projet. Des craintes fortes sont exprimées quant à la disparition des CRC ou la mise en place de la polyvalence marché et métier ou encore la délocalisation de certaines fonctions. De plus, le discours de la direction qui insiste sur le caractère volontaire du plan entre en contradiction avec ses modalités pratiques. La classification en P1, P2 et P3 empêchera certains départs. A l’inverse, la mécanique du repositionnement est vécue comme une réelle contrainte pour ceux qui souhaiteraient rester.

Ceux qui restent devront faire face à des conditions de travail qui se dégraderont. Ainsi, les élus ne peuvent que souligner un projet imaginé et conçu loin des réalités du terrain, avec une approche plus théorique qu’opérationnelle, faussant ainsi certaines des hypothèses. Alors que de nombreuses situations de surcharge de travail et autres dysfonctionnements sont constatés, que l’agilité est au cœur des échanges (agile à l’échelle) et que certaines activités s’interrogent quant à leur avenir, le projet apporte une réponse qui tend à aller à contre-courant. En effet, nombreux sont les salariés qui auraient espéré pouvoir participer à l’analyse de l’existant et travailler sur les pistes d’amélioration pour construire un projet à la hauteur de leurs attentes, de leurs besoins. A l’inverse, ils estiment qu’ils devront subir les conséquences des suppressions de postes en assurant une activité dont la charge ne sera pas aussi réduite qu’envisagée et que, dans certains cas, la période transitoire pourrait être longue avant d’atteindre les objectifs fixés pour les justifier. En effet, beaucoup craignent que les départs soient anticipés par rapport aux évolutions envisagées (robotisation, automatisation et transfert de charge) et que le temps nécessaire (formation, accompagnement et outils) représente une charge supplémentaire temporaire dans certaines équipes. Des compétences seront perdues à l’occasion de ce plan, ce qui rendra le fonctionnement futur plus difficile.

Un impact réel de ce projet sur les RPS a été constaté, avec une exposition significative à certains facteurs de risque. Si les risques liés à l’insécurité de la situation de travail sont directement induits par la nature du projet, d’autres facteurs ont été identifiés. L’intensité du travail et le temps de travail sont préexistants au projet, avec des situations de charge de travail importantes, de polyvalence ou encore des horaires de travail non maîtrisés et la nécessité d’allonger le temps de travail pour répondre aux besoins. Lors de l’annonce du projet, les exigences émotionnelles ont été impactées, du fait de situations de souffrance que celle-ci a pu générer. Aussi, des rapports sociaux au travail dégradés sont apparus, en particulier du fait de l’incompréhension de la motivation du projet visant à tant de suppression de postes et donc d’un manque de reconnaissance du travail effectué, d’un déséquilibre entre l’investissement personnel et/ou collectif et les évolutions envisagées dans le projet. L’impact sur la motivation des salariés est nuisible au fonctionnement de l’entreprise en cible. L’éloignement du terrain dans la phase de réflexion et de construction du projet ont aussi accentué ce constat.

Quelle entreprise voulons-nous pour demain ? Cette question simple mais essentielle ne trouve pas de réponse au-delà des objectifs de performance économique.

Ceux qui voudront partir sont freinés à plusieurs titres. D’abord, le manque de lisibilité du calendrier et de la procédure est évident. Les ordres de priorité ne sont pas clairs, empêchant les salariés de se projeter. Certains observent des départs qui pourraient atteindre le nombre de postes supprimés avant même la mise en œuvre du PDV. D’autres, non concernés par les suppressions de postes en P1, s’interrogent aussi sur la possibilité qui leur sera donnée de choisir un départ lors d’une phase ultérieure. Par ailleurs, des salariés se sentent exclus du plan, ne pouvant prétendre en « bénéficier ». Ensuite, les moyens d’accompagnement proposés jusqu’ici restent bien insuffisants au regard de la performance affichée par le groupe, ce qui est inadmissible du point de vue des salariés que l’entreprise souhaite licencier, mais aussi incompréhensible si la direction veut atteindre les objectifs qu’elle s’est fixée. Ajoutons que les séniors sont surreprésentés dans les populations P1, mais ne font pas l’objet d’un dispositif particulier dans les mesures proposées par la direction. Accompagner les fins de carrière est une nécessité, surtout pour une entreprise en restructuration. Enfin, l’indemnité proposée à ce jour favorise nettement les anciennetés inférieures à 15 ans. Une telle mesure n’est pas acceptable. Les élus rappellent que bien traiter ceux qui partent est un signal fort aussi envers ceux qui restent. Or les négociations avancent trop doucement, notamment en raison de l’absence de volonté d’aboutir. Cette absence de volonté s’illustre au moins par deux éléments :
1/ Non toutes les réponses n’ont pas été apportées aux OSR à ce jour. Certains sujets étaient en attente du retour du rendez-vous direction/DRIEETS le 12 mai et les organisations syndicales n’ont pas envoyé toutes leurs remarques et demandes. Ces deux points ont clairement été indiqués par/à la direction en réunion de négociation le 11 mai.
2/ Si la direction avait réellement l’intention de parvenir à un accord, elle ne se priverait pas des 3 semaines utiles entre le 25 mai et le 15 juin pour y arriver.

L’effort demandé aux salariés de BNPP PF pour redresser la situation, tout particulièrement à ceux employés en France, chez PFF et au Corporate mais aussi aux collègues qui œuvrent au sein des entités étrangères brutalement mises en extinction, est totalement disproportionné. Cette disproportion est telle qu’elle en vient à nourrir un sentiment d’incompréhension pour ne pas dire de fracture entre les dirigeants de l’entreprise et les salariés. Les options stratégiques radicales retenues dans le cadre de Re-Imagine ne suscitent pas l’adhésion, or une stratégie qui ne fédère pas ne rencontrera pas le succès.

La volonté d’aboutir à une négociation raisonnable et raisonnée des organisations syndicales bute sur une différence notable d’appréciation des attentes qui pourraient rendre efficace le PSE en créant de l’appétence.

Cette situation de blocage exacerbe les colères et rancœurs.

Quelle issue autre reste-t-il quand la surdité devient la règle ? Nos organisations syndicales s’interrogent fortement.

Après en avoir discuté entre elles nos organisations syndicales ont trouvé opportun de saisir le conseil de leurs désappointements face à cette situation critique.

Mesdames et messieurs les membres du conseil de BNPP PF nos organisations syndicales vous adressent cette question.

Face aux profits records et aux dividendes versés par BNPP SA. Face à l’horizon incertain pour eux et leur quotidien désenchanté. Face à une issue décevante de la négociation menée.

Pensez-vous réellement que face à cette situation les salariés de BNPP PF et nos organisations syndicales resteront inertes et passifs ?

 

Les Organisations Syndicales BNPP Personal Finance CFDT, CFTC, SNB/CFE-CGC, UNSA et FO

 

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